La chirurgie du Rasmussen : Verse et controverse

La topologie toujours prérolandique, avec ses clonies d’orteils caractéristiques, laisserait penser en toute logique qu’en extrayant cette partie du cortex on a trouvé la solution! Mais, hélas, ce qui est vrai dans le syndrome de Kojewnikow, du moins dans le 1er groupe car la lésion est stable, ne l’est pas forcément dans le syndrome de Rasmussen qui suit un processus dégénératif. Il faut donc nuancer cette approche.

Nous le ferons selon trois étapes:

1°) L'approche neuro-chirurgicale :Aussi, le docteur BANCAUD, neurochirurgien, conseillait la plus grande méfiance devant une cortectomie à visée curative car des reprises évolutives avaient été observées quand le malade n’était pas stabilisé. Cependant , la tendance, depuis 15 ans, est de pratiquer une hémisphérotomie en cas de pharmaco résistance et dans les formes graves; mais, depuis 3 ans, de nombreux auteurs s’accordent à dire que cette déconnexion des hémisphères cérébraux est le seul traitement vraiment efficace.

L’acte chirurgical consiste donc aujourd’hui, à faire une hémisphérotomie, c’est-à-dire à déconnecter les hémisphères cérébraux (selon l’axe corps calleux/commissures blanches/trigone), de façon à anticiper l’autodestruction inévitable de l’hémisphère atteint et d’éviter la propagation controlatérale des décharges épileptiques ainsi que l’extension de la zone irritative au côté opposé entraînant alors sa dysfonction qui serait préjudiciable.

La technique utilisée chez l’enfant, par les docteurs O. DELALANDEet G. Dorfmüller ( cf. Hémisphérotomie verticale parasagittale : technique opératoire, rapport 2008 ; neurochirurgie, Elsevier-Masson, disponible en ligne sur Internet depuis le 22 avril 2008 :

Résumé :Après l’apparition des complications à long terme de l’hémisphérectomie, diverses modalités ont été suggérées pour réduire celles-ci, en particulier en réduisant l’espace mort intracrânien laissé en place. Nous avons mis au point une technique originale de déconnexion hémisphérique permettant d’obtenir les mêmes résultats que l’hémisphérectomie anatomique sur le plan de l’épilepsie, avec d’excellentes conditions de fiabilité et de sécurité à court et à long terme. La technique est exposée en détail dans ce travail. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. WWW.sciencedirect.com )La technique consiste à faire un "puits" de 3 centimètres au sommet du crâne, (zone frontale pour ne pas toucher au cortex moteur), à prélever de la matière grise afin qu’elle soit analysée, et à sectionner, selon une logique "verticale", ce qui relie les deux hémisphères. Elle diffère quelque peu de celle utilisée par un ancien élève de RASMUSSEN, le docteur J.G. VILLEMURE de Suisse, et par le Professeur P. COUBES de Montpellier, dont l’approche est plus "temporale" puisque le scalp se fait "d’oreille à oreille"; mais le pourcentage de réussites est identique. Exceptionnellement, et quelle que soit la technique, une accumulation de liquide céphalorachidien (hydrocéphalie) peut s’ensuivre et provoquer de violents maux de tête. Une dérivation est alors faite pour évacuer l’excédent de liquide dans le ventre.

Par conséquent, la technique choisie par le neurochirurgien, dit le Professeur COUBES, importe peu, puisque opérer une encéphalite de RASMUSSEN n'est pas une situation très différente de certaines autres dysplasies ou encéphalopathies graves.

Ce qui différencie l'approche des deux équipes ajoute t’il, repose sur:

qui sont autant de facteurs importants, mais aussi sur d'autres considérations que le Professeur COUBES formulent ainsi:

Rappelons à ce propos une règle énoncée par JEANNEROD et HECAEN en 1979:
"L’ablation d'une zone spécifique pratiquée successivement sur chaque hémisphère ne détermine pas ou détermine moins de déficits que la même ablation pratiquée simultanément sur les deux hémisphères ".

Certes, la position du Professeur COUBES, dont le principal souci est " d'économiser le cerveau " quitte à réopérer, n'est pas standard mais Niels BOHR ne disait-il pas qu'" une vérité superficielle est un énoncé dont l'opposé est faux ; une vérité profonde est un énoncé dont l'opposé est aussi une vérité profonde ".

2°) La plasticité cérébrale :

Quoi qu’il en soit, et quelle que soit la technique retenue, les résultats sont spectaculaires chez les jeunes enfants car leur plasticité neuronale est encore importante.
Mais certains travaux nous amènent à nous interroger sur cette plasticité.

Ne vivons nous pas sur un poncif : celui du "Principe de Kennard" qui indique - et je cite Anne Laurent-Vannier, Dominique Geneviève Brugel et Maria de Agostini - qu'après une lésion cérébrale un jeune récupère mieux qu'un adulte du fait de la plasticité cérébrale?

Différents exemples montrent que ce principe est faux:

Il est vrai que Lucie Hertz-Pannier (Brain 2001) rapporte ce qui pourrait être considéré comme un contre-exemple de ce qui vient d'être rapporté : un enfant de 9 ans atteint de Rasmussen ayant subi une hémisphèrectomie gauche montre une plasticité tardive objectivée par l'IRM fonctionnelle et par une amélioration de tâches langagières : génération de mots et de phrases, audition d'histoires).Néanmoins son QI, 18 mois après l'intervention est de 64 alors qu'il était de 118 deux ans avant l'intervention et de 96 un an avant l'intervention. Les capacités d'apprentissage semblent avoir été très altérées sans parler de l'acquisition des compétences nouvelles.

Sur le plan moteur nous n'apprenons malheureusement rien !

Peut-être pourrait on objecter: que serait-il advenu si l'on n'avait rien fait vu que le QI avait commencé à régresser avant l'intervention?

Mais au total, disent ces auteurs " chez l'enfant, après une lésion cérébrale, le pronostic peut être très mauvais selon les lésions, l'âge de l'enfant et la localisation des lésions ".
Or " le principe de Kennard, ajoutent-ils, reste encore trop ancré dans les esprits quel que soit le contexte clinique " et quel que soit le corps de métier : médecins et paramédicaux.

En conclusion disent-ils " il est important d'être très prudent lorsqu'on annonce un pronostic après atteintes cérébrales chez l'enfant".

Discussion

"  Le principe de Kennard " rapportent B. Will (Laboratoire de Neurophysiologie et Biologie du comportement, Université Louis Pasteur, Strasbourg, France); D.G. Stein, (Gratuate school. Rutger University. Newark, N.J. Etats Unis), et S. Brailowsky (Instituto de fisiologia Cellular. Mexico, Mexique), mérite d'être remis en question. Bien que confirmée par de nombreuses observations, la " règle " semble souffrir de nombreuses exceptions et une étude récente menée par Passingham et ses collaborateurs à Oxford n 'a pas abouti aux mêmes conclusions que Kennard. Ils ajoutent : analysons ces discordances et essayons d'en expliquer l'origine .Plusieurs facteurs interviennent : d'une part, les variations du comportement et du cerveau liées au développement du sujet normal et , d'autre part, les différences de réaction des jeunes et des moins jeunes à une atteinte cérébrale. A cela il conviendrait d'ajouter un facteur méthodologique lié au fait que le facteur " âge " ne peut pas vraiment être dissocié de certains autres facteurs. Le cerveau comme le comportement varie en fonction de l'âge et lorsqu'on cherche à comparer des performances de sujets d'âges différents il faut se souvenir que ceux-ci n'appréhendent pas nécessairement le monde de manière équivalente, tant sur les plans sensoriel, moteur que motivationnel.

Bref, cet article tiré d'un ouvrage " les dépannages du cerveau ( Pour la Science) mentionne que "  comme les roses d'un même plant qui s'épanouissent à des jours différents, les aires cérébrales ne mûrissent pas toutes au même moment ".Selon Patricia Goldman, les parties intactes du cerveau pourraient assurer les fonctions de la région atteinte, lorsque les dégâts concerne un tissu immature non encore spécifié d'un point de vue fonctionnel, alors que les déficits seraient permanents lorsque l'atteinte porte sur une région déjà mature et spécifiée. "

De plus ,nous rapportent nos trois chercheurs, "  selon le site de la lésion et le moment précis de l'atteinte, le cerveau jeune peut-être le siège d'une dégénérescence neuronale post-lésionnelle bien plus importante que le cerveau plus âgé " alors qu'il est capable d'une plus grande plasticité compensatoire compte tenu des facteurs trophiques de régénération et de bourgeonnement "  printanier des neurones juvéniles " lésés et selon une " stabilisation sélective " de ce qui fonctionne au détriment de ce qui fonctionne moins, selon l'expression consacrée du Professeur Changeux

On comprend mieux alors le souci que pouvait éprouver à son époque le Professeur Talayrac d’ économiser le cerveau avant d'opérer même si aujourd'hui cette intervention laisse peu de traces : parfois une légère spasticité à la marche, c’est-à-dire une légère raideur; de plus, elle anticipe d’éventuelles récidives.

Rappelons que l’hémisphérectomie, qui consiste à retirer une partie d’un hémisphère n’est pas indiquée. Quant à la callosotomie, elle serait insuffisante.

Il est bien évident que la décision de pratiquer une hémisphérotomie est grave à prendre pour des parents quand leur enfant n’est pas encore hémiplégique. Comment, en effet, faire accepter à un enfant de perdre momentanément l’usage de sa main ou de sa jambe, de le "mutiler" en quelque sorte pour qu’il ne devienne pas handicapé un jour! De plus, avons-nous suffisamment de recul pour écarter d éventuelles récidives ?

Ce n’est qu’après-coup, quand les crises deviennent pharmaco résistantes et le déficit important que les parents reconnaissent qu’un recours plus précoce à la chirurgie aurait été préférable, comme l’expriment Y. HART et F. ANDERMANN.

Mais il est important que cet enfant sache qu’il récupèrera et que sur le plan scolaire les résultats seront spectaculaires…si l’intervention est faite le plus tôt possible. Et il n’y a peut être, pas de temps à perdre avec des thérapeutiques bien souvent illusoires car si elles modifient l’évolution clinique de la maladie, peuvent-elles en modifier l’évolution ultime?

Plus tard, l’intervention dépendra de l’hémisphère affecté et de la compensation controlatérale qui s’est faite avec les années et qui a permis à l’hémisphère déficient d’être pris en charge par l’hémisphère sain! Il y a de l’héroïsme discret dans de telles décisions et parfois, l’assurance d’une " véritable renaissance", comme nous en avons reçu le témoignage, à condition de stimuler ces enfants: STIMULER, est le maître mot.

Pourquoi un tel espoir ?

Parce qu'il est temps de remettre en cause un dogme sur lequel nous vivons toujours et qui a été énoncé par Ramon y Cajal en 1928:

" Dans le cerveau adulte, les voies nerveuses sont fixées et immuables; tout peut mourir, rien ne peut régénérer ".

Mais il croyait malgré tout "  qu'il était du devoir des futurs scientifiques...animés par des idéaux élevés...de continuer à œuvrer pour éviter ou moduler le délabrement graduel (et continu)des neurones, la rigidité quasi invincible de leurs connexions et, finalement, pour obtenir que de nouvelles voies nerveuses se mettent en place lorsque des maladies disjoignent des populations de neurones intimement associées ".

Et son rêve de facteurs nutritifs capables de régénérer le cerveau lésé devient une réalité:

- la vicariance nous en apporte la confirmation : ce mot est de la même famille que le mot vicaire: en terme ecclésiastique, le vicaire est celui qui remplace le curé en son absence. Cela veut dire en neurobiologie, " que dans une région du cerveau, n'importe quelle cellule nerveuse est capable d'assurer, aussi bien qu'une autre, une certaine expression fonctionnelle, comportementale, sensorielle ou motrice ".

De plus, on sait depuis peu qu'un neurone n'élabore pas son neurotransmetteur spécifique comme le voulait la théorie unitaire de la neurotransmission : fabricant par exemple de la dopamine, il est codé pour fabriquer le cas échéant un ou plusieurs neurotransmetteurs .

- la redondance: il y aurait dans notre cerveau des structures différentes capables de mettre en oeuvre les mêmes fonctions à la manière d'un double circuit de freinage ou de systèmes informatiques de remplacement dans les avions. N'est-ce pas le rôle ce ce " deuxième cerveau " qu'est la névroglie?

- le " deuxième cerveau ": c'est sous ce titre accrocheur que Science et vie du mois de novembre 2005 nous fait découvrir le rôle important de cellules cérébrales non nerveuses appelées gliales qu'un médecin allemand Rudolf Virchow a découvertes en 1856. Ce magma de cellules forment la glie (la glue) qui est essentielle à la création des neurones, à leur croissance et à la formation de nouvelles synapses et cela tout au long de notre vie, à partir de cellules souches se trouvant essentiellement dans l'hippocampe. Plus une espèce est évoluée plus son cerveau compte d'astrocytes qui forment la " névroglie "

La glie est composée:

1°) de la microglie:elle est formée par des cellules sentinelles équipées de bras qui explorent les zones alentour; elles sont la base du système immunitaire ; elles défendent le système nerveux contre toute agression infectieuse;

2°) des oligodendrocytes : ce sont des cellules qui présentent des prolongements qui s'entourent en spirales autour des fibres nerveuses en formant des gaines de myéline qui isole , protège et facilite le passage de l'influx nerveux.

Mais ce tissu nourricier contrôle l'alimentation des neurones grâce aux bras astrocytaires qui pompent dans le sang le glucose dont ils ont besoin. Il règle aussi l'homéostasie cérébrale et assure également la survie des cellules nerveuses en " épongeant " les substances toxiques du cerveau lésé.

Il ne faut cependant pas que la cicatrisation qu'elles déterminent à la longue, soit délétère en entravant le bourgeonnement par formation d'une sorte de bourgeon.

Mais ce qui est vraiment digne d'intérêt c'est de voir ces cellules gliales en culture qui en présence de NGF commencent à perdre leur forme " étoilée "," elles élaborent des prolongements qui ressemblent à des axones et elles innervent du tissu musculaire exactement comme le feraient des neurones .Sous des conditions appropriées, les cellules gliales peuvent même stocker et libérer des " neurotransmetteurs " tels que l'acétylcholine!" (cf. les dépannages du cerveau; facteurs endogènes de croissance et de réparation, p.95).

Or, " les gliologistes " cherchent à prouver, grâce au microscope biphoton de l' Institut de biologie cellulaire de Lausanne,l'existence d'une communication astrocytaire !

Car les astrocytes stabilisent le réseau neuronal. Ils ont les moyens de faciliter, de ralentir voire de bloquer la neurotransmission. Comment jouent-ils ce rôle de chef d'orchestre ?

Il existe donc une autre voie de communication cérébrale, qui fonctionne grâce à une cascade de réactions biochimiques au sein des astrocytes même et qui produit une forte quantité d'ions calcium selon un modèle ondulatoire qualifié de " vague calcique "assurant la synchronisation de l'influx nerveux. Ce réseau de communication est lent et vient réguler celui de l'influx nerveux 100 000 fois plus rapide.

Après avoir abordé la vicariance, la redondance et la glie qui concourent à la plasticité cérébrale dépendante essentiellement de facteurs chimiques libérés par les astrocytes, abordons maintenant le rôle du NGF dont nous venons d'entrevoir le rôle dans la métamorphose des cellules gliales. C'est une clef multipotente si précieuse que ce facteur évoquerait de " la gelée royale " humaine !

les substances neurotrophiques:

" Le NGF... réussira-t-il à remettre de l'ordre dans les circuits neuronauxaltérés par des agents qui annulent les capacités fonctionnelles de cet organe immensément complexe qu'est le cerveau de l'Homo sapiens? ".

(Rita Levi-Montalcini, 1989)

Le NGF, libéré notamment pendant la marche, a été découvert il y a quelques décennies par la neurobiologiste italiene, Rita Levi-Montalcini; c'est le sigle de " Nerve Growth Factor " qui est une protéine dont la structure a été déterminée par le biochimiste américain Stanley Cohen. Tous deux ont mérité le Prix Nobel car cette substance est capable d'induire l'excroissance de fibres nerveuses à partir d'un ganglion isolé.

Le NGF préside notamment à la survie des neurones sollicités dans la mémoire et qui fabriquent l'acétylcholine.

Sa concentration augmente en cas de souffrance cérébrale ( 5 à 50 fois plus élevée, surtout dans les dix jours qui suivent l'atteinte),afin d'antagoniser également " les protéines tueuses "qui détruisent les neurones.

Le CAL: " Cell Adhesion Molécules " : ce sont des protéines qui permettent de guider les neurones par adhésion à la surface externe des cellules .Les NCAM en permettent l'adhésion entre eux, tandis que les NgCAM en permettent l'adhésion aux cellules gliales. Ils pourraient être synthétisés au cours de l'association répétée d'un stimulus et de la réponse à ce stimulus. De là la restauration de circuits nerveux ou même la formation de nouveaux , réactifs aux mêmes sollicitations !

la reprogrammation neuro-fonctionnelle ontogénique sur laquelle repose la méthode de rééducation de Béatrice PADOVAN et de sa fille le docteur Sonia PADOVAN):

" une partie du cerveau qui n'est pas associée normalement à une certaine fonction, pourrait être "  reprogrammée " ou, plus exactement, pourrait exprimer d'une façon nouvelle son bagage génétique pour prendre en charge les fonctions de l'aire lésée ".

On parle alors de " substitution fonctionnelle " qui conduit à une véritable restauration des comportements (marche, nutrition) même s'ils ne sont pas complètement identiques aux comportements précédents désormais disparus. Et cela, il faut bien l'admettre! Cette substitution s'accompagnerait alors d'une réorganisation nerveuse et l'on peut se demander avec B. WILL, D.G. STEIN et S. BRAILOWSKY, dont nous venons de résumer en grande partie la pensée, comment une zone du cerveau peut-elle prendre en charge la fonction qui lui est dévolue tout en en assumant une nouvelle !

l'approche hologrammique:

Nous devons au Professeur de neurochirurgie K.PRIBRAM cette vision hologrammique de la microstructure du cerveau :" les cellules du cerveau transforment au niveau des récepteurs ce qui est reçu par les sens . Tout est transformé selon le procédé de FOURIER et c'est cette information que nous stockons. Dans le cerveau nous stockons donc la transformation, nous ne stockons pas l'original ". Le procédé de Fourier, mathématicien français, nous dit que " toute structure peut être analysée en ondes simples très régulières de fréquences et d'amplitude différente; on peut donc, après avoir analysé cette structure et l'avoir réduite en ses ondes simples qui la formaient, entreprendre le processus inverse et on reconstruit la structure, le modèle premier à partir des ondes; ainsi on retrouve l'original " à condition que les fréquences soient stationnaires ce qui est rarement le cas en réalité.

Dans le modèle hologrammique, le temps et l'espace sont repliés, selon l'expression de David BOHM, et le tout est replié dans chaque partie mais chaque partie contient le tout et conserve l'étrange propriété de reconstruire l'image du tout: c'est ainsi que le Professeur Maurice Tubiana, cancérologue et membre de l'Académie des sciences, écrit dans Recherche et Santé d'août 2007 :

" la démonstration chez les souris, qu'une seule cellule souche peut reconstituer l'ensemble des cellules du sang, a permis de guérir des leucémies, en détruisant la moelle osseuse envahie par les cellules leucémiques et en la reconstituant par une greffe ".

Il nous faut donc revenir sans cesse à l'âge où la forêt de bambou emboîtée et repliée va surgir d’une pousse, où la mer n'est encore qu'une goutte d'eau et où l'homme n'est encore qu'un nourrisson.

C'est ainsi que " la physique moderne suggère que l'ordre replié (=impliqué) est l'ordre de base et que l'ordre déplié (= expliqué) n'est qu'une abstraction du premier ".

La technique géométrique de l'origami en apporte l'illustration : c'est un art japonais de pliage d'une seule feuille de papier qui se résume à un schéma très simple mais qui s'inspire des principes du vivant.

(D'après " la nouvelle aventure du cerveau " : émission télévisée réalisée par André Voisin et Jacotte CHOLLET le 20 mai 1982, avec le Professeur K. PRIBRAM et D. BOHM).

Il faut malgré tout émettre des réserves sur l'application de la transformation inverse de FOURIER au cerveau dont les cellules, comme nous l'avons vu, ne stockent pas l'original de ce qui est reçu au niveau sensoriel, mais uniquement la transformation; en effet, le docteur Christian NEGRE fait remarquer avec pertinence que pour retrouver la structure d'origine, cette théorie suppose un état stationnaire des fréquences ondulatoires que l'on ne voit pas dans le monde réel, tant sur la terre que dans l'univers car l'une comme l'autre nous offrent un spectacle déconcertant d'ordre et de désordre !

Nous retrouvons ici le vieux débat philosophique entre le réalisme et l'idéalisme que soulève d'ailleurs le professeur K. PRIBRAM en se demandant " si ce que nous découvrons sont des sortes de lois de l'univers ou si c'est nous qui inventons quelque chose que nous calquons ou projetons simplement sur l'univers " :

" Je vois le monde comme je suis, je ne le vois pas comme il est ", dit Paul ELUARD.Il n'est pas dans notre propos de résoudre ce problème asymptotique, celui d'un monde qui n'est pas celui que nos yeux perçoivent c'est à dire d'une réalité faite de nombres et de rapports de nombres qui échappe à notre perception! Nous renvoyons le lecteur intéressé par cet aspect philosophique à l'ouvrage de Bernard D'ESPAGNAT: " à la recherche du Réel ".

3°) L'exploration du cerveau lésé et le pronostic post-opératoire :

Après avoir abordé l'espoir que génère la neuroplasticité cérébrale et le pourquoi de la neurochirurgie nous pouvons maintenant nous poser la question : comment envisager cet acte si lourd de conséquence. En cas d’intervention chirurgicale, différentes technologies permettent de mieux cerner les zones épileptogènes ; la scintigraphie, mais aussi les enregistrements EEG intra cérébraux: 9 microélectrodes, dont le diamètre ne mesure que 40 micromètres, sont insérées dans une macro électrode intracérébrale et s’ouvrent en parapluie en s’échelonnant tous les 500 micromètres sur une distance de 3 à 5 mm.

Si le foyer se situe au niveau temporal gauche, qui est le siège de la parole surtout chez l’homme (la femme semblant plus parler avec ses deux hémisphères car son corps calleux serait plus large ?), les parents sont en droit de se demander si leur enfant ne risque pas de devenir aphasique, c’est-à-dire s’il risque d’avoir du mal à parler." Un certain degré de transfert du langage peut survenir jusque dans la deuxième décennie, mais ce langage transféré est toujours rudimentaire, même s’il est effectué très tôt. Le concept de forcer le langage à se transférer sur l’autre hémisphère par une hémisphérectomie précoce n’a pas été entièrement validé, par comparaison avec une hémisphérectomie plus tardive, lorsque le test de l’amytal intracarotidien montre qu’un certain développement controlatéral du langage s’est produit", (Taylor et Andermann, observations personnelles; Boatman et al.1999), suite à une atrophie progressive et inéluctable de l’hémisphère atteint.

Rappelons qu’une asymétrie anatomique des régions qui sous-tendent le langage existe déjà avant la naissance : le planum temporale gauche est plus développé que le droit dès 29 semaines de gestation chez environ 24% des fœtus et 70% des nouveaux - nés, et donc bien avant toute expérience linguistique…" (EPILEPSIE PRATIQUE n° 6).

L’IRM fonctionnelle pré chirurgicale des réseaux du langage s’impose alors afin d’éviter les déficits post-opératoires du langage. " En effet, rapportent HERZ-PANNIER, C.CHIRON, DEHAENE-LAMBERTZ (EPILEPSIE PRATIQUE n°6, Mars 2005), aucun critère anatomique ou clinique fiable ne permet de déterminer la spécialisation hémisphérique du langage chez un patient donné. Les régions activées par une tâche "expressive"( production du langage ) concernent un vaste réseau périsylvien qui associe l’aire de Broca,le cortex préfrontal latéral, l’aire motrice supplémentaire ( cortex préfrontal médial ), l’ aire de Wernicke, et la région temporo-basale". Mais une expérience chirurgicale importante (50 cas) dans l’encéphalite de Rasmussen montre que, quel que soit l’hémisphère touché, l’hémisphère controlatéral finira par assumer la récupération du langage. Les quelques malades qui présentent à titre exceptionnel un foyer épileptogène dans chacun des hémisphères cérébraux rendent cette intervention beaucoup plus plus délicate !

En conclusion de ce chapitre consacré à la neurochirurgie, laissons la parole à un neurologue d'expérience, le docteur Christian NEGRE:

" Le problème dans le Rasmussen est très complexe pour définir le pronostic de la chirurgie, en effet :

Cependant la thèse du docteur C. Bulteau , G. Dorfmüller, M. Fohlen, C. Jalin, M.-V. Oliver, O. Delalande : Evolution à long terme des déconnexions hémisphériques. Rapport 2008 paru dans neurochirurgie , Elsevier-Masson : traitements chirurgicaux de l' épilepsie chez l' enfant : disponible en ligne sur www. sciencedirect.com. , apporte les précisions suivantes :

Les procédures chirurgicales de déconnexions hémisphériques ont évolué au cours des 50 dernières années et l’hémisphérectomie anatomique a été progressivement abandonnée en raison des nombreuses complications postopératoires au profit des techniques dites d’hémisphérotomie. Toutes techniques opératoires confondues, les déconnexions hémisphériques entraînent 50 à 80% d’arrêt des crises. Les techniques opératoires et les étiologies sont les principaux facteurs intervenant dans le contrôle des crises. Les meilleurs résultats sont obtenus avec les techniques d’hémisphérotomie et chez les enfants présentant un syndrome de Sturge-Weber, une encéphalite de Rasmussen ou des séquelles d’accident vasculaire cérébral ; la majorité des patients sont libres de crises et d’antiépileptiques. Le devenir clinique montre une amélioration de l’état préopératoire au niveau du comportement et de l’autonomie avec des capacités hétérogènes. Des difficultés importantes sont notées dans le domaine moteur alors que les capacités de socialisation et de communication verbale sont meilleures et apparaissent corrélées à la durée de l’épilepsie ; plus cette durée est longue, plus faibles sont ces capacités. L’étude du devenir neuropsychologique après déconnexion hémisphérique réalise une situation exceptionnelle pour analyser les mécanismes de spécialisation hémisphérique et comprendre les possibilités de récupération cognitive. Au niveau moteur, il existe une réorganisation de la région sensorimotrice qui permet non seulement une marche autonome mais aussi la persistance de certaines habiletés de la main du côté hémiplégique. Au niveau du langage, les deux hémisphères peuvent prendre en charge certaines.

Dernière mise à jour du site : 2012